4 août 2009

Le redécoupage électoral : faux problème, vraie polémique...

Le Parti Socialiste de Seine Saint-Denis a diffusé un communiqué de presse alarmant sur le futur redécoupage électoral dans le département. D'après les auteurs de ce communiqué, la circonscription d'un député socialiste disparaîtrait, et les autres circonscriptions "détenues par le parti socialiste" seraient bouleversées. Devant tant de mauvaise foi, il est difficile de ne pas répondre.

Tout d'abord, une seule circonscription va disparaître en Seine Saint-Denis, la 10eme, et, elle n'est pas réputée socialiste (sauf bien sûr si on considère que la Seine Saint-Denis revient de droit au PS, mais c'est un autre problème...). Le Parti Communiste l'a reconnu également, par la voix de leur porte-parole Olivier Dartigolle.
D'autre part, redécoupage électoral signifie nécessairement bouleversement des circonscriptions, par définition. Aussi, quelque soit le redécoupage final, il n'y aura pas que les circonscriptions actuellement détenues par des députés socialistes qui seront touchées.
Enfin, il est bon de rappeler que seuls les électeurs sont propriétaires de leurs voix, et que par conséquent, il n'y a pas de circonscription qui soit figée à droite ou à gauche, et heureusement du reste, sinon, les mêmes seraient constamment élus !

Maintenant, puisque manifestement les socialistes séquano-dionysiens ont la mémoire courte, deux petits contre arguments s'imposent.

Le premier, le plus facile, c'est qu'au lieu de crier au loup, les socialistes n'auraient-ils pas mieux fait d'effectuer le redécoupage sous le gouvernement de Lionel Jospin, comme l'y obligeait la Loi Pasqua ? Pourquoi entre 1981 et 1993, c'est durant les 2 années de pouvoir de la droite que cette toujours délicate opération qu'est un redécoupage électoral a eu lieu ? Pourquoi entre 1997 et 2002, alors qu'ils en avaient l'occasion, les socialistes n'ont-ils pas pris, à leur tour, leurs responsabilités ? Peut-être parce que comme le disait souvent François Mitterrand, celui qui touche au mode de scrutin risque gros à l'élection suivante... Bref, en terme de transparence, le PS pouvait faire mieux...

Le deuxième contre-argument est un peu plus délicat, car il s'appuie sur une réalité historique : la défaite de la droite en 1988. Rappelons-nous, en 1986, les élections législatives ont lieu à la proportionnelle par listes départementales, grâce à une habile manigance électorale du couple Mitterrand/Fabius. En effet, la proportionnelle ne garantit pas de majorité nette à la droite, ce qui l'affaiblit, d'autant plus qu'elle permet l'entrée du Front National dans l'Hémicycle... La proportionnelle aux législatives est alors abandonnée pour les élections de 1988, et c'est Charles Pasqua qui est chargé d'effectuer le redécoupage électoral. Celui-ci cherche à plus ou moins maintenir le nombre de députés de chaque camp dans chaque département, en se basant sur les derniers résultats. Pour la Seine Saint-Denis, les résultats avaient donné 3 députés PCF, 4 PS, 1 UDF, 3 RPR et 2 FN, soient 13 députés. 13 circonscriptions destinées à garder le même nombre de députés à gauche et à droite (exception faite qu'aucune circonscription n'était susceptible d'être remportée par le FN) ont donc vu le jour, . Ainsi, à partir des résultats de 1986, on pouvait s'attendre à voir en 1988 4 ou 5 députés UDF-RPR, et 8 ou 9 députés PS-PCF. Résultat : en 1988, 5 députés PS et 6 députés PCF furent élus, contre 2 RPR... Le redécoupage version Pasqua, censé favoriser au moins un certain statu-quo par rapport à 1986 s'avéra être un atout pour la gauche, qui passa quand même de 7 à 11 députés en 2 ans...

Après avoir dit tout ça, nous espérons que les socialistes vont se plonger dans l'histoire électorale récente, et arrêter de nous reservir la sempiternelle opposition à tout (va). Personne n'est propriétaire des voix des français, et c'est la vague nationale née de l'adhésion à un projet qui fait basculer une élection législative. Ça serait bon d'y réfléchir avant de reprocher au gouvernement de faire ce que d'autres auraient pu et dû faire avant.